Ma première session d'examen terminée, je me suis vite remis au boulot pour vous pondre un nouvel article sur un sujet passionnant mais tout de même difficile. Les atmosphères stellaires sont extrêmement importantes en Astrophysique stellaire et même en Astrophysique en général car elles sont le reflet de la composition interne et du stade évolutif de l'étoile mais également de la composition chimique du milieu interstellaire environnant.
C'est donc d'atmosphère stellaire qu'on va parler aujourd'hui. Mais ce n'est que le premier article de la physique des atmosphères stellaires. Dans cet article on va voir quelles sont les théories de base des atmosphères stellaires, celles qui fonctionnent bien et qui permettent d'analyser les étoiles au premier ordre sans trop de problème. Dans le prochain article sur les atmosphères stellaires, on verra tous les effets plus complexes dont il n'existe pas de théorie qui les décrivent de manière précise et que l'on est obligé de simuler sur ordinateur.
Une atmosphère c'est quoi ?
En gros, c'est une couche gazeuse qui enveloppe le plus souvent un astre de densité plus élevée. On peut voir cette couche comme une "coque" dont les bords sont très mal définis dans le cas des étoiles puisque la fonction de densité qui les décrit évolue de manière assez "douce". Cette couche de gaz est composée suivant ces caractéristiques thermodynamiques de molécules plus ou moins complexes, d'atomes seuls, d'ions et d'électrons si la température est élevée. De manière générale, on peut voir une atmosphère comme un plasma c'est à dire un gaz partiellement ionisé (composé d'un peu de gaz neutre, mais aussi d'ions et électrons libres) que l'on caractérise par ce que l'on appelle le degré d'ionisation.
Dans cet article, on va voir que les atmosphères stellaires sont des objets très complexes qui nécessitent de développer beaucoup de modèles physiques et chimiques pour les décrire proprement. Comme d'habitude, je ne vais pas résister à l'envie de vous mettre quelques formules. Pour ceux qui sont à l'aise avec ce genre de physique tant mieux, pour les autres, ne vous en faites pas, l'article est lisible même sans comprendre les formules.
Cet article ne va pas être simple et je vous recommande une petite liste d'articles à lire avant si vous n'êtes pas aguerris en physique :
- La décomposition de la lumière
- La physique des plasmas
- L'atome (2) : Des modèles de plus en plus précis
- L'atome (3) : Le modèle quantique de l'atome
- Mesures de distances stellaires (2) : Méthode du décalage spectral
- La physique des étoiles (1) : Caractéristiques fondamentales

Le plasma à la surface de l'étoile
On a déjà vu dans les précédents articles qu'une étoile peut être décrite par une immense boule de plasma chaud à l'équilibre. Ceci est plus ou moins vrai, on verra ça plus tard. Tout d'abord, voyons de quoi se compose un plasma à la surface d'une étoile.
Rappel sur les plasmas
Un plasma stellaire de surface est un gaz chaud dont la température varie entre et
suivant le type de l'étoile. Comme toutes les étoiles, ce dernier est principalement composé d'hydrogène
%, d'hélium
% et de ce que l'on appelle les métaux
% qui sont enfaite tous les éléments plus lourds que l'hélium. Ces derniers définissent ce que l'on appelle la "métallicité" de l'étoile qui est un paramètre très important lorsqu'on parle d'évolution stellaire.
En Astrophysique, on caractérise généralement la composition chimique de surface d'une étoile par ce que l'on appelle les abondances stellaires. On écrit généralement :
où est l'abondance de surface d'hydrogène,
est l'abondance de surface d'hélium et
est l'abondance de surface d'éléments lourds.
Ce plasma est à une température telle qu'il contient des éléments ionisés, c'est à dire dont le ou les électrons de la dernière couche électronique a une énergie supérieure à l'énergie qui le lie au noyau. On parle généralement d'électrons libres. On identifie les éléments chimiques d'une étoile de la manière suivante :
pour l'hydrogène neutre c'est à dire non-ionisé. L'énergie des électrons de la dernière couche n'est pas assez élevée pour que ces derniers se détachent du noyau. On parle d'électrons libres.
pour l'hydrogène une fois ionisé. Cette fois, l'énergie de l'électron est suffisamment élevée pour que ce dernier se libère de la force attractive du noyau. Ceci marche aussi pour d'autres éléments comme
l'hélium une fois ionisé,
l'azote une fois ionisé etc ...
pour l'hélium deux fois ionisé. Il n'existe pas d'hydrogène deux fois ionisé puisque ce dernier ne contient à l'état neutre qu'un seul électron. L'hélium en revanche en contient 2 et lorsqu'il est deux fois ionisé, les deux électrons possèdent une énergie suffisante pour se libérer de la force attractive du noyau. On peut continuer ainsi tant qu'on veut dans la mesure ou l'élément chimique en question contient suffisamment d'électrons à l'état neutre.
On parle enfaite de degré d'ionisation. Ce dernier dépend principalement de la température électronique et de l'énergie de liaison des noyaux.
La température électronique s'apparente à la température d'un gaz. Elle est enfaite définie par la distribution statistique des vitesses des électrons dans un gaz d'électrons. La température électronique n'est pas forcément égale à la température cinétique (celle qu'on connait). Effectivement, dans un plasma on a deux températures que l'on appelle température électronique associée aux électrons, et température cinétique
associée aux ions et aux "neutres" (atomes).
Chacune des deux températures est déterminée par une fonction que l'on appelle distribution des vitesses (ou d'énergie par la relation . La différence principale qu'il y a entre les électrons et les ions + neutres, c'est la masse (
). Il est plus facile de d'accélérer un électron qu'un ion ou un neutre et c'est la raison pour laquelle on observe des températures différentes.

Mais dans certaines conditions de température et densité, la température électronique est égale à la température cinétique. Pour que cela soit vrai, il faut que le plasma soit suffisamment chaud et dense. On dit que le plasma doit être à l'équilibre thermodynamique (notion très importante en astrophysique stellaire). Dans les atmosphères stellaire, ceci est vrai en première approximation. Dans des gaz chaud mais diffus ( faible) comme les nébuleuses planétaires par exemple, c'est totalement faux. La température électronique est différente de la température cinétique.
Mais qu'est ce que l'équilibre thermodynamique ?
On définit un plasma à l'équilibre thermodynamique si les paramètres thermodynamiques qui le définissent suivent les lois de la thermodynamique à l'équilibre. Ce que je viens de dire est étrange mais attendez, je vous donne un exemple.
Un gaz parfait est un parfait exemple de système thermodynamique à l'équilibre. On le définit généralement comme un gaz composé de particules de tailles et distantes les unes des autres en moyenne de
tel que
. Il y a donc peu de collisions et ces collisions sont dites élastiques, c'est à dire qu'il y a conservation de l'énergie à chaque collision. On caractérise ce gaz par une équation d'état :
où est la pression,
est le nombre de particules par unité de volume,
la constante de Boltzmann et
la température cinétique. Vous connaissez surement
, c'est presque pareil.
Ce qui est génial en physique des plasmas, c'est que si le plasma est à l'équilibre thermodynamique, on peut utiliser cette relation et et tout va bien ! Sinon c'est un peu plus compliqué. La condition est que le nombre de collisions entre particules soit grand devant le nombre d'interactions avec des photons. On dit aussi que la pression radiative est faible devant la pression cinétique (de matière).
Des quantités physiques adaptées
En astrophysique, on utilise énormément la théorie du transfert radiatif. C'est à dire la théorie qui décrit l'émission lumineuse et son absorption dans un milieu, de quelle manière et quelle quantité d'énergie est réémise et sous quelle forme ? C'est cette théorie qui permet en partie d'expliquer la présence d'un continuum et de différentes raies d'émission ou d'absorption dans le spectre d'une étoile. Cette théorie utilise des outils que je vais vous décrire brièvement afin que les articles suivants sur la physique des étoiles ne soient pas trop ardus.
Le continuum, les raies spectrales
Vous le savez certainement, il est possible de disperser la lumière des étoiles (expérience du prisme) pour en obtenir le spectre. Dans ce spectre on observe des raies en absorption (creux), des raies en émission (pointes) et tout cela sur fond de continuum (sorte de "bruit de fond").



Les raies en absorption et en émission sont le résultat de transitions électroniques entre deux niveaux d'énergie de l'élément chimique qui émet ou absorbe la raie. Le continuum est plutôt associé au rayonnement thermique de l'étoile, ce sont tous les processus associés à dynamique du plasma en particulier aux interactions coulombiennes entre particules chargées. Le continuum correspond à cette forme qui s'approche de celle de l'émission d'un corps noir.
Je ne m'attarde pas trop sur cette partie puisqu'on va la voir plus en détail plus loin.
Le flux lumineux
Vous en avez certainement déjà entendu parler, le flux décrit une quantité de quelque chose (des photons par exemple) qui traversent une surface par unité de temps. On définit plusieurs types de flux.
- Le flux bolométrique (
) représente l'énergie totale rayonnée par une étoile par unité de surface par unité de temps (
).
- Le flux monochromatique (
) représente l'énergie rayonnée par une étoile par unité de surface, par unité de temps et par fréquence électromagnétique (
)
- On définit aussi le flux à travers un filtre, c'est à dire le flux sur une certaine bande de fréquences électromagnétiques. Effectivement, lorsqu'on observe un objet astrophysique, le flux qui nous parvient se trouve dans la bande optique, on n'observe pas le flux infrarouge ou encore UV par exemple. Lorsqu'on veut déterminer les propriétés physiques de l'objet et qu'on a besoin du flux total (
), il nous faut corriger par un modèle le flux mesuré.
L'épaisseur optique
L'épaisseur optique () est une grandeur qui définit le degré de transparence d'un milieu. On la définit généralement par rapport à un coefficient dit d'extinction (
) qui est relié à l'opacité (
) du milieu.
- A épaisseur fixée, plus le milieu est opaque, plus l'épaisseur optique est grande.
- A opacité fixé, plus la couche de gaz est épaisse, plus l'épaisseur optique est grande.
La fonction source
Comme son nom l'indique, la fonction source () permet de décrire la source du rayonnement lumineux. Dans le cas d'une atmosphère d'étoile à l'équilibre thermodynamique, on pourra l'associer à la distribution du corps noir (fonction de Planck).
L'équation de transfert
Toutes les grandeurs que j'ai présenté permettent enfaite de décrire l'évolution de l'intensité lumineuse en fonction de la profondeur dans l'atmosphère de l'étoile. On peut résumer toute la théorie du transfert radiatif en une très simple équation (en apparence) appelée "équation de transfert radiatif" :
Cette équation peut très vite devenir impossible à résoudre (même numériquement) suivant la fonction source et la fonction d'extinction que l'on choisit. Ces deux paramètres dépendent tous deux à la fois des propriétés dynamiques macroscopiques du plasma (pression, densité, mouvements de matière, champ magnétique ... ) et des propriétés microscopiques du plasma (agitation thermique, processus d'émission lumineuse, micro-turbulence ...)
Le continuum et les raies spectrales
Maintenant que l'on a vu la plupart des aspects techniques qui concernent la théorie du transfert radiatif, on va voir quels sont les processus à l'origine de la formation des raies en absorption et en émission. On va également voir quels sont les processus qui sont à l'origine du continuum c'est à dire de cette forme piquée qui ressemble grossièrement à la distribution du rayonnement d'un corps noir.
Raies en absorption
Les raies en absorption sont un exemple très simple de modèle de transfert radiatif. On observe ces raies lorsqu'il y a un gaz froid qui se situe entre nous et la source de lumière qu'on observe.
Dans les étoiles, la source lumineuse () correspond à l'intérieur de l'étoile qui est bien plus chaud que sa surface. Ce rayonnement lumineux va être absorbé par le plasma "froid" de surface de manière différente suivant la longueur d'onde du rayonnement que l'on considère. C'est précisément ce que l'on voit quand on observe une raie en absorption.
Mais pourquoi le rayonnement n'est pas absorbé de manière homogène en longueur d'onde dans le plasma ?
Enfaite, il y a tout un tas de phénomènes d'absorption différents qui se passent lorsqu'on regarde l'interaction rayonnement matière au niveau d'un plasma chaud ("froid" puisqu'il est en surface de l'étoile). Mais il y a un phénomène en particulier qui est à l'origine de la raie d'absorption en-elle même.
Ce phénomène est tout simplement lié aux niveaux d'énergie quantifiés des atomes ou des ions qui composent le plasma. Lorsqu'un photon interagit avec un élément chimique, son énergie détermine en grande partie le processus qui va se dérouler. En première approximation, on peut dire que si l'énergie du photon incident n'est pas exactement égale à la différence d'énergie de deux niveaux électroniques, alors il ne se passera rien. En revanche, si son énergie est telle qu'elle correspond à la différence de l'énergie de deux niveaux électroniques, alors le photon va donner son énergie à l'électron situé sur le niveau inférieur et le faire monter au niveau supérieur. C'est ce que l'on appelle une transition atomique aussi appelée un processus radiatif lié-lié ou encore bound-bound en anglais.

Raies en émission
Les raies en émission suivent à peu près le même processus physique que les raies en absorption à la différence que cette fois ce n'est pas un creux infiniment fin que l'on observe mais un pic infiniment fin. Certains d'entre vous ont peut-être déjà eu l'occasion au lycée d'observer un spectre d'émission (constitué uniquement de raies en émission) d'un gaz quelconque. Ce que l'on observe, c'est que lorsque notre gaz est chauffé à une température importante (), il émet ce genre de rayonnement uniquement composé que pics d'émission infiniment fins.
Le processus à l'origine de ce dernier est enfaite l'inverse de celui qui est à l'origine des raies en absorption. Lorsque le gaz est chauffé, les éléments chimiques de ce dernier sont dans état excité, l'énergie des électrons est élevée et certains éléments sont même ionisés c'est à dire que leurs électrons avaient suffisamment d'énergie pour échapper au potentiel attractif du noyau. La conséquence de ceci est que les électrons libres vont aller taper les éléments chimiques excités et les désexciter en faisant descendre un électron d'un état excité vers un état de plus basse énergie. L'élément chimique va alors émettre un photon d'énergie bien précise qui peut à son tour aller frapper un autre élément chimique et, s'il est excité le désexciter en émettant un photon supplémentaire (processus de désexcitation collisionnelle), s'il est dans un état de basse énergie, se faire absorber comme dans le cas d'une raie en absorption (processus d'excitation collisionnelle). Mais dans le cas d'un gaz chaud, tous les éléments chimiques sont dans un état excité, c'est donc le processus de désexcitation collisionnelle qui va dominer.
Il peut également arriver qu'un électron sur un niveau excité descende spontanément vers un niveau d'énergie plus faible en émettant un photon. On appelle ça un processus d'émission spontanée.

Tous ces effets comptent pour une grande partie de la théorie de l'interaction rayonnement-matière et il y a énormément à dire sur le sujet. Je pourrai éventuellement en faire un article plus tard. Quoi qu'il en soit, on observe finalement un spectre constitué de pics très fins et d'énergie très précise correspondant aux différentes transitions atomiques du gaz en question.
Les effets d'élargissement
Seulement, en pratique on n'observe pas exactement des creux et des pics infiniment fins. Les raies sont généralement assez larges et leur forme témoigne précisément de la nature des milieux que le rayonnement traverse avant d'arriver à nos yeux.
Il existe différents processus d'élargissement qui dépendent de tout un tas de paramètres différents comme la température, la vitesse de rotation de l'étoile, sa composition chimique, son champ magnétique, la résolution spectrale des instruments avec lesquels on l'observe etc ...
L'élargissement radiatif
Ce dernier est dû aux désexcitations spontanées des éléments chimiques dans un état excité. Enfaite, de manière plus fondamentale l'élargissement radiatif est une conséquence du principe d'incertitude de Heisenberg qui dit dans ce cas que l'énergie de la transition radiative est inversement proportionnelle au temps de stabilité de l'électron sur un niveau d'énergie excité. Cet élargissement est présent sur tous les éléments même si ils sont seuls, ils n'ont absolument pas besoin d'être stimulés de l'extérieur pour que les raies en question soient élargies.
L'élargissement collisionnel
Les éléments hydrogénoïdes (hydrogène neutre HI, hydrogène ionisé HII, l'ion etc ...) composent plus de 70% du plasma de surface de l'étoile. Ils sont donc en très grande partie responsables de l'élargissement spectral collisionnel. En particulier ce phénomène ce caractérise par des collisions dites élastiques entre éléments chimiques et électrons libres ou encore d'autres éléments chimiques. Le spectre d'émission est élargit par l'interaction des photons émis par transitions atomiques avec les électrons libres du milieu. Effectivement, il ne faut pas oublier que les photons sont des particules qui symbolisent le champ électromagnétique et que les électrons possèdent une charge électrique ce qui fait que les électrons et les photons interagissent ensembles.
Il existe d'autres effets très similaires comme l'effet Stark qui consiste enfaite en des modifications des différents niveaux d'énergie des électrons dues à la présence d'un champ électrique externe. Il y a d'autres effets un peu similaires comme l'élargissement résonnant qui découle de l'interaction de deux éléments chimiques qui ont exactement les mêmes niveaux d'énergie, et l'élargissement de Van Der Waals qui est associé à l'interaction moléculaire dans les plasmas stellaires les plus froids ().
L'élargissement Doppler
L'élargissement Doppler est le phénomène d'élargissement dominant dans un plasma stellaire. Il est directement associé à la température du plasma qui est elle-même reliée à la vitesse thermique d'agitation des éléments chimiques. Lorsqu'un élément émet un photon à une certaine longueur d'onde correspondant à la transition entre deux niveaux électroniques, nous observerons une longueur d'onde qui dépend de la vitesse relative de la particule émettrice par rapport à la vitesse moyenne (quadratique) des particules de ce même plasma. Dit autrement, le rayonnement émis subit un effet Doppler qui dépend de la vitesse de la particule source, et la raie Doppler-élargie correspond à peu de choses près à la distribution de vitesses des éléments émetteurs.

Cet effet d'élargissement est également relié à des phénomènes de macro et micro-turbulence du plasma mais également aux effets de la rotation plus ou moins rapide de l'étoile qui entraine un redshift d'un côté de l'étoile et un blueshift de l'autre côté. C'est pourquoi, lorsque l'étoile est trop loin pour être résolue spatialement, on observe un élargissement Doppler principalement du à la vitesse de rotation de l'étoile.
L'effet Zeeman
L'effet Zeeman n'est pas rangé dans la catégorie élargissement spectral mais plutôt dans la catégorie dédoublement spectral. En effet ce phénomène est à l'origine d'une décomposition d'une raie d'absorption par exemple en un doublet, un triplet, un n-uplet de raies qui dépend très fortement du champ magnétique (longitudinal) de l'étoile.
Pour un atome d'hydrogène en l'absence de champ magnétique externe, le moment angulaire de l'électron est dégénéré c'est à dire qu'il existe plusieurs configurations électroniques possibles pour avoir un électron ayant la même énergie. Le champ magnétique va avoir pour effet de lever cette dégénérescence de telle manière qu'il y aura maintenant plusieurs énergies possibles pour les différentes configurations électroniques.
On observe alors de nouvelles raies très proches qui n'existent pas en l'absence de champ magnétique externe. Expérimentalement, c'est dédoublements de raies sont difficiles à observer car l'espace entre deux raies est de l'ordre de l'Angström (). Cependant, il existe une technique pour les observer appelée la spectropolarimétrie. En effet, les dédoublées possèdent une polarisation bien définie et différente, il nous suffit alors de placer un filtre polarisant tournant en amont de notre spectrographe ce qui va nous permettre de séparer en amplitude les deux raies zeeman-splitées.

Le continuum
Après avoir vu les différents processus à l'origine de la présence de raies d'émission et d'absorption, on peut maintenant voir quels sont ceux qui donnent au spectre de l'étoile une forme qui s'approche de celle du rayonnement d'un corps noir mais pas en tous points.
La distribution de Planck du rayonnement thermique
Le premier responsable de cette "forme" est l'intérieur stellaire. En effet, le libre parcours moyen ( distance moyenne parcourue par un photon avant d'interagir avec de la matière par exemple) des photons est très court, on peut alors considérer l'intérieur stellaire comme optiquement épais c'est à dire que le plasma dans l'étoile est très opaque, diffusif et à l'équilibre thermodynamique.
Dans cette situation, la physique statistique prévoit une distribution d'énergie du champ de rayonnement appelée rayonnement de Planck et donnée par la formule :
où est l'intensité du rayonnement reçu à la longueur d'onde
et qui dépend de la température du bain thermique
.
est la constante de Boltzmann,
est la constante de Planck et
la vitesse de la lumière dans le vide.
Cette formule compliquée est extrêmement importante car elle a une origine théorique et non phénoménologique ce qui la rend extrêmement précise lorsqu'il s'agit de décrire un champ de rayonnement électromagnétique à l'équilibre (un bain thermique). C'est ce que l'on appelle précisément le rayonnement du corps noir où est la température du bain thermique.


La raison pour laquelle le spectre d'une étoile s'approche plus ou moins grossièrement du spectre du corps noir est que l'étoile est un objet plus ou moins à l'équilibre thermodynamique. Les divergences que l'on observe entre le spectre de l'étoile et le spectre du corps noir viennent de la présence de raies d'absorption et d'émission et d'autres processus d'interaction rayonnement matière qui témoignent du fait que l'étoile n'est pas parfaitement à l'équilibre thermodynamique (raison pour laquelle on parle de processus hors équilibre thermodynamique). L'absence d'équilibre est aussi la raison pour laquelle l'étoile évolue dans le temps.
Ce qu'il faut retenir de cela pour la physique des atmosphères stellaires, c'est que le rayonnement du corps noir représente une sorte de "zéro" que les différents processus vont venir modifier.
Diffusion Thomson
La diffusion Thomson n'est rien d'autre que la diffusion de photons sur des électrons qui jouent le rôle de cibles. On retrouve cette diffusion sur les atmosphères d'étoiles chaudes car l'énergie des électrons est suffisamment élevée pour qu'il se libèrent du potentiel Coulombien des noyaux. L'opacité du plasma de surface est alors très importante.
Absorption Bound-Free
Dans la plupart des étoiles, c'est le processus d'absorption Bound-Free qui domine. Ce facteur d'opacité met en jeu l'hydrogène neutre HI qui est l'élément dominant dans beaucoup d'atmosphères stellaires. Cette fois-ci, les photons ne vont pas diffuser sur les électrons puisqu'il n'y en a plus de libre mais sur les différents niveaux d'énergie de l'hydrogène neutre.
Lorsqu'on discute de collision entre deux particules, un photon et un atome d'hydrogène par exemple, on utilise un terme que l'on appelle section efficace d'interaction. Géométriquement, la section efficace représente la surface de la particule cible (HI) et donc la probabilité que le photon interagisse avec cette dernière. En réalité c'est un tout petit peu différent parce qu'il ne faut pas oublier qu'aux échelles ou on travaille c'est la mécanique quantique qui domine et que la section efficace d'interaction est définie à partir de probabilités d'interaction.
L'absorption Bound-Free de photons par des atomes d'hydrogène signifie que l'énergie du photon est suffisante pour ioniser l'atome. Mais la probabilité que le photon ionise l'atome d'hydrogène va dépendre que la section efficace d'interaction. Cette dernière est donnée par :
si
si
On aura donc ionisation de l'atome d'hydrogène si et seulement si l'énergie du photon incident est supérieure à l'énergie d'ionisation de l'atome d'hydrogène. Cette énergie va dépendre du niveau d'énergie de l'électron qui est lié au au noyau. Si par exemple, l'électron est dans l'état fondamental (), l'énergie d'ionisation de l'atome d'hydrogène est de
ce qui correspond à une longueur d'onde minimale de
. Si le photon possède une longueur d'onde supérieure à
, il n'ionisera pas l'atome. Maintenant si l'électron est dans un niveau d'énergie plus élevé,
par exemple, l'énergie d'ionisation de l'atome est de l'ordre de
ce qui signifie qu'un photon de longueur d'onde
suffira pour ioniser l'hydrogène.
La conséquence de ce phénomène est qu'on observe à certains endroits des sortes de pointes ou marches d'escalier qui "perturbent" le continuum.


L'ion 
L'ion joue également un rôle très important dans les atmosphères stellaires plutôt froides car il absorbe les photons par interaction Bound-Free et Free-Free. L'énergie de l'électron supplémentaire est très faible (
) et est facilement ionisé par un photon de plus haute énergie. Cet ion est la principale source d'opacité dans les étoiles de type solaire.
Il existe pas mal d'autres processus d'interaction plus ou moins complexes qui créent de l'opacité et "déforment" le continuum mais grosso-modo je vous ai présenté les plus importants.
La physique des étoiles est une science très complexe fondée sur beaucoup de théories différentes. Ce que je vous ai présenté, ce n'est que la partie émergée de l'iceberg de la physique des atmosphères stellaires. En effet, il y a beaucoup d'autres caractéristiques des atmosphères stellaires que je ne vous ai pas présenté comme par exemple l'interaction du plasma avec les champs magnétiques, les cellules convectives, les éruptions solaires, tous les phénomènes magnétohydrodynamiques qui découlent de l'aspect hors équilibre de la surface de l'étoile. J'aborderai ces différentes notions dans un prochain article biensûr.
Mais vous avez déjà vu un premier aspect technique de la physique des étoiles. Ce n'est vraiment pas évident de décrire la surface des étoiles dans les moindres détails sans avoir à faire de la physique très technique, veuillez m'en excuser. Mais si vous avez des questions ou des commentaires à faire n'hésitez pas ! J'ai peut-être écrit pas mal de choses imprécises donc si vous êtes un expert en astrophysique stellaire, n'hésitez pas à me faire remarquer mes erreurs, je l'ai corrigerai.
Entre temps, si cet article vous a plu, n'hésitez surtout pas à le partager et si vous souhaitez me soutenir, faites moi un petit don ne serai'ce que pour payer l'hébergement du serveur 🙂