La décomposition de la lumière

Vous vous êtes certainement déjà demandé d’où venaient les couleurs et quelle est la nature de la lumière. Vous vous êtes surement déjà demandé comment se forme un arc en ciel ou même pourquoi le ciel est bleu. La lumière est un phénomène bien mystérieux dont nous allons explorer certaines caractéristiques fascinantes.

Commençons avec un peu d’histoire. L’homme s’intéresse à la lumière et à sa nature depuis l’antiquité notamment avec Euclide qui rédigea en 280 avant Jésus Christ son ouvrage intitulé « Optique ». Dans son ouvrage est résumé le savoir de l’époque sur la lumière comme sa propagation en ligne droite par exemple. Viennent ensuite Héron d’Alexandrie et Claude Ptolémée qui respectivement au premier et au second siècle supposent que la lumière se propage à une vitesse infinie et discutent du passage de la lumière dans les milieux continus. Bien plus tard, entre le XVII et le XVIII siècle, Descartes, Newton et Fermat fondent la branche bien connue de la physique appelée « Optique géométrique », c’est ainsi que sont proposés les principes de base du comportement de la lumière et qui sont aujourd’hui très utilisés. Dans le même temps, le fonctionnement de l’œil humain commence à être cerné et permet ainsi d’approfondir l’étude du comportement de la lumière.

Qu'est ce que la lumière ?

La lumière consiste en un transport d’énergie sans transport de matière. C’est une onde qui peut se propager dans le vide. On peut définir la lumière de deux manières différentes suivant la théorie que l’on utilise : Soit on utilise la théorie électromagnétique et alors la lumière est une onde électromagnétique, soit on utilise la théorie quantique et alors la lumière est composée de quanta d’énergies – particules de masse nulle – appelés photons. Dans notre article, on considèrera la lumière comme une onde électromagnétique.

L’onde électromagnétique est définie par quelques paramètres fondamentaux.

Elle est définie par ce que l’on appelle une amplitude qui se rapproche de l’intensité lumineuse, par exemple l’amplitude de l’onde électromagnétique issue d’un Laser et bien plus élevée que celle issue d’une diode électroluminescente ou voyant rouge de votre téléphone.

Elle est également définie par une période temporelle et une période spatiale. Imaginez-vous les ondes créées par un caillou jeté dans l’eau. Ces ondes ont une période temporelle, c’est-à-dire que si l’on fixe un point de l’onde, on le verra osciller en une période bien précise. Elles ont aussi une période spatiale, si l’on prend une photo de la coupe de l’onde, et que l’on mesure deux fois la distance entre deux points à la même hauteur, alors cette distance correspond à la période spatiale. Et bien pour la lumière c’est exactement la même chose.

La lumière fait partie de ce que l’on appelle le spectre électromagnétique qui est une extension de la lumière visible.

Voici une "représentation" courante du spectre électromagnétique. On le définit soit par sa longueur d'onde soit par la fréquence de cette onde (les deux sont reliés). Nous constatons que les rayons les plus énergétiques (les rayons gamma ici à gauche) possèdent la longueur d'onde la plus courte tandis que les ondes radio (à droite) possèdent la longueur d'onde la plus élevée. La lumière visible se situe au milieu du spectre; cette gamme de fréquences est celle à laquelle sont sensibles nos yeux.

Comme vous pouvez le constater, l’œil humain n’est adapté que pour voir la lumière dont la longueur d’onde spatiale est comprise entre 400 et 800 nm (un nm correspond à un milliardième de mètre). Les ondes dont la période spatiale est très courte sont très énergétiques, c’est pourquoi les rayons responsables des coups de soleils sont les UV (Ultra Violet), les rayons X et Gamma sont heureusement déviés par le champ magnétique terrestre et l’atmosphère car sans, nous ne ferions pas long feu.

Vous le savez très probablement, la lumière se déplace à environ 300 000 km/s dans le vide et ce en ligne droite ce qui n’est pas le cas dans un milieu.

Le comportement de la lumière dans un milieu

Tout d’abord, il s’agit de comprendre de quoi parlons-nous lorsqu’on parle de milieu. Un milieu c’est tout simplement de la matière, mais celui-ci est défini par des paramètres bien précis qui découlent de l’agencement des molécules qui composent le milieu.

Un milieu peut être homogène, il est le même partout. Prenez l’exemple d’un verre de lait frais, sa surface est homogène, à l’inverse le lait périmé depuis un bon bout de temps à peu de chance d’être homogène puisque qu’il présente généralement des grumeaux. Sa surface est alors inhomogène.

Un milieu peut être isotrope, il présente les mêmes caractéristiques dans toutes les directions. A l’inverse, on le qualifie d’anisotrope.

Un milieu peut être chargé électriquement ou être neutre. Lorsque vous frottez une règle en plastique contre un tissu, la zone de frottement devient généralement chargée (positivement ou négativement, on parle d’électrisation) et attire ou repousse les petits objets généralement neutres électriquement.

Afin de discuter simplement du comportement de la lumière, nous allons nous restreindre aux milieux homogènes, isotropes et neutres électriquement car le comportement de la lumière est assez spécial dans les autres milieux.

Dans tous les milieux, la lumière subit ce que l’on appelle de la dispersion. A l’échelle quantique il se passe la chose suivante. La lumière sous forme de photon arrive en ligne droite en direction d’un milieu matériel. Elle possède une certaine probabilité d’entrer en collision avec un atome. Si tel est le cas, un électron de la couche atomique externe sera excité pendant une certaine durée et se désexcitera ensuite en réémettant un photon. La conséquence à l’échelle macroscopique est que la lumière se déplace plus lentement dans les milieux que dans le vide. Cette vitesse dépend de plus de la longueur d’onde de la lumière utilisée. Lorsque la lumière pénètre dans un milieu, elle répond toujours au schéma suivant.

Lorsque la lumière arrive à l'interface entre le vide et un milieu, il se passe toujours les phénomènes suivants : Une partie de la lumière est réfléchie par la paroi et repart vers l'extérieur, l'autre partie de la lumière traverse le milieu sans être absorbé par celui-ci.

On définit généralement un milieu matériel par un indice de réfraction. Cet indice est directement lié à la vitesse de propagation de la lumière dans le milieu, c’est-à-dire aux propriétés de la matière que traverse le faisceau lumineux. Cet indice est extrêmement important en optique géométrique car il permet par exemple de comprendre pourquoi lorsque vous plongez une paille dans l’eau elle semble brisée ou encore pourquoi lorsque vous regardez vos pieds dans une eau claire ils semblent plus proches de vous comme si vous aviez rétréci. Évidement les applications technologiques sont extrêmement nombreuses, je pourrais par exemple vous citer la fibre optique, les lentilles et donc tous les appareils qui utilisent des lentilles …

Mais voyons l’importance de cet indice à travers un schéma que vous connaissez probablement.

Le rayon incident arrivant à l’interface séparant les deux milieux que l’on appelle le dioptre va se diviser en deux. Un rayon réfléchi qui repart dans le milieu initial – ici le vide – et le rayon réfracté qui part dans le milieu matériel, de l’eau ou du verre par exemple. Sur le schéma, nous constatons que l’angle d’incidence du rayon incident est exactement le même que celui du rayon réfléchi. En revanche, il est supérieur à l’angle de réfraction du rayon réfracté. C’est ici que le rôle des indices des milieux est extrêmement important. En réalité ce schéma répond à une loi très simple proposée par Snell et Descartes en 1637 et qui constitue un des piliers de l’optique géométrique.

Utilisons le dernier schéma pour comprendre pourquoi la paille vous parait non-seulement cassée lorsqu’elle est plongée dans un verre d’eau mais surtout plus grosse.

Si l’on considère que AB est la distance correspondant au diamètre de la paille plongée dans l’eau et ce à une profondeur correspondant à la distance d et que l’on regarde cette partie de la paille depuis l’air en étant à la même distance d de la surface de l’eau, on la verra comme si elle mesurait la taille A’B’ et comme A’B’ > AB nous voyons la paille plus grosse qu’elle ne l’est en réalité.

Lumière monochromatique et polychromatique

Il est très important de faire la distinction entre la lumière monochromatique et la lumière polychromatique. La lumière monochromatique est composée d’une seule longueur d’onde - imaginez une corde de guitare qui vibre – tandis que la lumière polychromatique est composée de plusieurs longueurs d’onde – imaginez plusieurs cordes de guitare qui vibrent en même temps. En quelque sorte, la lumière polychromatique est constituée de plusieurs couleurs ou est une somme de lumières monochromatiques.

Il n’existe pas de sources absolument monochromatiques ; même le laser n’est est pas une même si il s’en rapproche (merci à la mécanique quantique), on parle de lumière pseudo-monochromatique. Toutes les lumières que vous voyez autour de vous sont en fait un mélange d’une infinité de longueur d’onde. Il existe une infinité de couleurs entre le bleu et le rouge et il existe également une infinité de couleurs entre le rouge orangé et le rouge sombre.

Voici le spectre d’émission d'un laser He-Ne simple. Sa couleur tire vers le rouge et nous voyons sur le graphique de l'intensité lumineuse en fonction de la longueur d'onde que le maximum d'émission est autour de 630 nm. La source lumineuse est qualifiée de pseudo-monochromatique car elle est concentrée autour d'une fine bande de fréquences.
Voici le spectre d'émission du Soleil (la courbe oscillant). Nous constatons qu'à la différence du laser, le soleil émet dans une large gamme de longueurs d'onde. On qualifie la lumière du soleil de lumière polychromatique. La couleur du soleil correspond à la somme de toutes les longueurs d'onde d’émission.

La lumière du soleil est celle qui se rapproche le plus de la lumière blanche. Effectivement, elle est composée de toutes les longueurs d’ondes du spectre de la lumière visible. Vous savez maintenant que les couleurs n’existent jamais seules ; cela n’a d’ailleurs pas de sens de parler d’une seule longueur d’onde, c’est un peu comme si on parlait d’un point en mathématique, or, qu’est-ce qu’un point ?

L'expérience du prisme et la décomposition de la lumière

Vous savez maintenant que la lumière n’est pas composée d’une seule longueur d’onde mais d’une « somme continue » - une intégrale pour les connaisseurs – de longueurs d’ondes. Vous savez aussi que tous les milieux (même opaques) possèdent un indice de réfraction qui va de 1 pour le vide et peut être très élevé pour les milieux les plus opaques. Cet indice de réfraction est directement relié à la vitesse de la lumière dans le milieu. On sait que la lumière dans le vide se déplace à 299 997 km/s et que l’indice de réfraction du vide est 1. On peut connaitre la vitesse de la lumière dans les milieux. Par exemple, l’indice de réfraction de certains types de verres est de 1.36 par une formule très simple, on en déduit que la lumière se déplace à 220 586 km/s dans le  verre. A l’échelle atomique, ce ralentissement se traduit par l’excitation pendant une petite durée aléatoire des électrons des couches externes des atomes qui composent le verre et leur désexcitation en ré émettant un photon.

Il reste une seule petite information qui vous permettrait de comprendre pourquoi il est possible de décomposer la lumière blanche en une multitude de couleurs à l’aide d’un prisme. Ce phénomène vient tout simplement de l’indice de réfraction du milieu. Effectivement, cet indice varie en fonction de la longueur d’onde.

Mais que se passe-t-il physiquement ?

L’explication touche à la physique atomique mais je vais quand même vous donner quelques bribes d’explications.

Nous savons que les atomes sont composés d’un noyau et d’électrons qui gravitent autour. Ces électrons sont placés sur des orbites bien précises qui correspondent à des niveaux d’énergies quantifiés. En gros, il ne faut pas imaginer un électron qui gravite autour du noyau comme on pourrait imaginer la Terre tourner autour du soleil. La différence est que l’énergie de la Terre n’est pas quantifiée ; si l’on en avait les moyens, on pourrait faire ralentir légèrement la rotation de la Terre pour la rapprocher un tout petit peu du soleil. Ceci est bien évidemment impossible pour un électron, non seulement techniquement mais également théoriquement.

Pour que l’électron passe d’une orbite/niveau d’énergie à une autre/autre niveau d’énergie, le photon doit avoir une énergie précise ; si il a un peu plus d’énergie ou un peu moins d’énergie que ce qu’il faut, il ne se passera rien. Or on a vu que l’énergie d’un photon est directement relié à sa longueur d’onde donc à sa couleur. En revanche, si le photon possède pile la bonne énergie, alors, l’électron va l’absorber et changer d’orbite pendant un court instant aléatoire. L’atome sera excité. Un instant plus tard – on parle en milliardièmes de seconde – l’électron va redescendre sur une couche inférieure, et en perdant son énergie, il va réémettre le photon qu’il avait précédemment absorbé. C’est la raison pour laquelle pour certaines longueurs d’onde, la lumière sera plus lente que pour d’autres, donc que l’indice dépend de la longueur d’onde.

Revenons finalement à la loi de Snell-Descartes que j’ai précédemment schématisé pour une seule longueur d’onde.

Comme l’angle de déviation est relié à l’indice de réfraction qui est lui-même reliée à la vitesse de la lumière dans le milieu, il est logique qu’un rayon bleu ne soit pas dévié de la même façon qu’un rayon rouge.

L’expérience du prisme devient alors très simple et est compréhensible en un seul schéma.

Chaque longueur d'onde est réfractée selon un angle différent, la conséquence est que la lumière blanche (qui est en fait un mélange des couleurs du spectre visible) s'étale prenant l'apparence d'un arc en ciel.

Vous comprenez maintenant d'ou viennent les arc en ciel, vous savez également pourquoi tout parait plus ou moins gros dans l'eau ou en tout cas déformé... La lumière se retrouve dans une grande quantité voire l'intégralité des phénomènes de l'univers, en conséquence les applications pratiques et potentielles mettant en jeu la décomposition de la lumière sont très nombreuses. 

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Longueur
Pertinence
Difficulté
Total